Filtrer
Éditeurs
Langues
Accessibilité
Prix
Sciences humaines
-
"Nous commencerons par discuter les points de vue pris sur la femme par la biologie, la psychanalyse, le matérialisme historique. Nous essaierons de montrer ensuite positivement comment la "réalité féminine" s'est constituée, pourquoi la femme a été définie comme l'Autre et quelles en ont été les conséquences du point de vue des hommes. Alors nous décrirons du point de vue des femmes le monde tel qu'il leur est proposé ; et nous pourrons comprendre à quelles difficultés elles se heurtent au moment où, essayant de s'évader de la sphère qui leur a été jusqu'à présent assignée, elles prétendent participer au mitsein humain."
Simone de Beauvoir. -
"Comment la femme fait-elle l'apprentissage de sa condition, comment l'éprouve-t-elle, dans quel univers se trouve-t-elle enfermée, quelles évasions lui sont permises, voilà ce que je chercherai à décrire. Alors seulement nous pourrons comprendre quels problèmes se posent aux femmes qui, héritant d'un lourd passé, s'efforcent de forger un avenir nouveau. Quand j'emploie les mots "femme" ou "féminin" je ne me réfère évidemment à aucun archétype, à aucune immuable essence ; après la plupart de mes affirmations il faut sous-entendre "dans l'état actuel de l'éducation et des moeurs". Il ne s'agit pas ici d'énoncer des vérités éternelles mais de décrire le fond commun sur lequel s'élève toute existence féminine singulière."
Simone de Beauvoir. -
« Quand je dis que je travaille à un essai sur la vieillesse, le plus souvent on s'exclame : "Quelle idée ! Mais vous n'êtes pas vieille ! Quel sujet triste..." Voilà justement pourquoi j'écris ce livre : pour briser la conspiration du silence. À l'égard des personnes âgées, la société est non seulement coupable, mais criminelle. Abritée derrière les mythes de l'expansion et de l'abondance, elle traite les vieillards en parias.
Pour concilier cette barbarie avec la morale humaniste qu'elle professe, la classe dominante prend le parti commode de ne pas les considérer comme des hommes ; si on entendait leur voix, on serait obligé de reconnaître que c'est une voix humaine.
Devant l'image que les vieilles gens nous proposent de notre avenir, nous demeurons incrédules ; une voix en nous murmure absurdement que ça ne nous arrivera pas : ce ne sera plus nous quand ça arrivera. Avant qu'elle ne fonde sur nous, la vieillesse est une chose qui ne concerne que les autres. Ainsi peut-on comprendre que la société réussisse à nous détourner de voir dans les vieilles gens nos semblables.
C'est l'exploitation des travailleurs, c'est l'atomisation de la société, c'est la misère d'une culture réservée à un mandarinat qui aboutissent à ces vieillesses déshumanisées. Elles montrent que tout est à reprendre, dès le départ. C'est pourquoi la question est si soigneusement passée sous silence ; c'est pourquoi il est nécessaire de briser ce silence : je demande à mes lecteurs de m'y aider. »
Simone de Beauvoir. -
Idéalisme moral et réalisme politique
Simone de Beauvoir
- Gallimard
- Folio Le Forum
- 19 Octobre 2017
- 9782072749087
"Réconcilier morale et politique, c'est donc réconcilier l'homme avec lui-même, c'est affirmer qu'à chaque instant il peut s'assumer totalement." À l'origine, quatre articles parus dans Les Temps modernes dans la première année d'existence de la revue, entre 1945 et 1946. Il s'agit pour Beauvoir de défendre l'existentialisme naissant contre les lieux communs émis par "la sagesse des nations". Pourquoi est-ce si important ? Parce que la prétendue sagesse des nations dessine une vision du monde à laquelle les existentialistes ne souscrivent pas : il faut remettre en question les clichés définitifs comme "le bonheur n'est pas de ce monde" ou "la nature humaine ne changera jamais". Dans cette période d'après-guerre où la société a été déchirée et les liens distendus, la question de la morale se pose dans d'autres termes. Les rapports entre l'idéalisme moral et le réalisme politique méritent qu'on s'y arrête : peut-on vraiment considérer que cette question est datée ?
Folio Le Forum est une collection de textes de réflexion, en lien avec l'actualité. Incisif, engagé sans être partisan, chaque ouvrage interpelle le lecteur, comme le dit clairement la couverture. -
Dans La force de l'âge, Simone de Beauvoir a raconté comment, de 1935 à 1937, elle a écrit Quand prime le spirituel, son premier livre, resté longtemps inédit.
'Je résolus cette fois de composer des récits brefs. Je me limiterais aux choses, aux gens que je connaissais ; j'essaierais de rendre sensible une vérité que j'avais personnellement éprouvée. J'indiquais le thème par un titre ironiquement emprunté à Maritain. La première nouvelle décrit l'étiolement d'une jeune fille à l'institut Sainte-Marie. Dans la seconde, je m'amusais à imaginer, chez une adulte, la dégradation de la religiosité en chiennerie. Dans la troisième, l'héroïne, par son entêtement à jouer un rôle, jetait dans des désastres deux jeunes élèves qui l'admiraient. J'avais réussi à rendre cette distance de soi à soi qu'est la mauvaise foi. Dans la quatrième, je tentai à nouveau de ressusciter Zaza. J'échouai. Cinquième nouvelle : une satire de ma jeunesse. Mon enfance au cours Désir et la crise religieuse de mon adolescence. Ce récit était de loin le meilleur...
Sartre en approuva de nombreux passages.