La pensée politique européenne contient un vaste réservoir d'idées et de conceptions qui peuvent servir de remèdes aux maux des sociétés contemporaines.
Ces idées et ces conceptions - inspirées par le républicanisme et l'humanisme civique - ont constitué, jusqu'à une période récente, une sorte de « face cachée » dans l'écriture de l'histoire de la philosophie politique moderne, alors même qu'elles représentent un trésor pour faire face aux difficultés que rencontre l'affranchissement de l'individu dans les sociétés libérales de notre temps.
Comment disposer d'un pouvoir politique suffisamment dégagé de toute entrave pour pourvoir, en toutes circonstances, de la communauté des lois dont elle a besoin ? Comment instituer ce pouvoir pour que, dans le même temps, sa liberté ne se tourne pas en moyen d'oppression ? Telles sont les deux questions auxquelles le concept bodinien de souveraineté tente de répondre, sans les séparer. Parce qu'il faut un pouvoir qui ne soit jamais paralysé, c'est à une souveraineté indivisible et sans partage qu'il appartient de faire la loi et de pourvoir à son exécution. Mais parce que cette souveraineté n'existe que pour la défense de la république et de ses membres, l'arbitraire en est nécessairement exclu. En imaginant une combinaison possible entre l'efficacité du pouvoir et la garantie des sujets, l'oeuvre politique de Jean Bodin (1529-1596) se situe donc aux origines de la réflexion moderne sur le droit de l'État.